Nouvelle Lune (partie 66)
Après avoir chacun discuté individuellement avec Nicolas, tous les membres de la famille à Kelly se rassemblèrent, d'abord dans le silence, puis ils dirent leurs adieu à Nicolas...
Nicolas partit seul de la maison. Aucun des membres de leur famille n'avait voulu l'accompagner pour marcher jusqu'à son lit de mort, pas même Mireille qui était pourtant, en tant qu'adulte, convoquée à la pendaison de tous les condamnés. Aucun d'entre eux n'avait le cœur de marcher à ses côtés pour l'escorter à l'endroit qui le ferait mourir comme un bandit. Aucun d'entre eux n'avait envie de jouer un rôle plus grand encore dans sa mort. À ce moment, il n'était plus de leur devoir de s'occuper de Nicolas. S'il décidait de fuir en route, ce n'était pas leur problème. Personne ne pouvait demander d'eux qu'ils assistent à la mort d'une personne qui leur tenait tant à cœur. Personne. Alors ils ne se présentèrent pas et restèrent ensembles, solidaires comme Nicolas le leur avait demandé.
Même si c'était la première journée qu'Alex passait en tant que membre de leur famille et qu'il était par conséquent moins proche du vieil homme que Kelly ou Mireille, le garçon avait avoué à sa sœur d'adoption qu'il avait tellement été souvent avec elle dans le passé qu'il considérait son tuteur un peu comme son deuxième père. Comme Kelly avec les parents de l'orphelin. Aussi était-il presque aussi affecté qu'elle dans cette perte. Et le fait qu'il venait tout juste de perdre ses deux parents et sa petite sœur n'aidait en rien. Il était en train de perdre tous ceux qu'il aimait, les uns après les autres. Et sa venue dans leur famille avec l'espoir renouvelé de pouvoir s'accrocher à une figure paternelle n'avait été que chaotique. Avait été ruiné.
Aujourd'hui ne peut être qu'une bonne journée, les enfants...
Les paroles exactes que Mireille avaient prononcées le matin même.
...parce que c'est la première complète avec Alex dans notre famille !
Encore une fois, Kelly ne put que penser à quel point sa grand-mère s'était trompée. Cette journée s'était annoncée comme l'une des plus belles de leur vie. Et, ce soir, elle n'en pensait plus un mot. Elle avait vu un cadavre, celui de William que Nicolas avait tué. Ils avaient appris que Cynthia était bel et bien une créature satanique, ou un loup-garou, par l'entremise de la lettre d'Esteban adressée à cette dernière. Ils avaient dans ce moment passé à travers d'un choc immense aux côtés d'Alex. Sylvie avait passé à deux doigts de la mort. Mireille avait trahi Nicolas. Ce soir, ce dernier se faisait pendre.
Non, cette journée avait été tout sauf belle. Pourquoi chaque événement heureux de leurs vies devait-elle toujours être suivi d'une série de catastrophes ? Qu'avaient-ils fait pour mériter cela ? Pour mériter ces deuils à revendre et ces morts encore plus nombreuses ?
Qu'avait-elle fait pour mériter la mort de son tuteur ? Pour ne jamais connaître ses parents biologiques ? Pourquoi le ciel semblait-il lui en vouloir à ce point ?
Tellement de questions et si peu de réponses. Comme cela avait toujours été le cas, au fond.
— C'est l'heure de vous coucher, les enfants.
Mireille, les yeux toujours dans le vide, assise sur le divan avec Kelly et Alex à sa droite, énonça la demande d'un ton vide et détaché sans faire elle-même aucun geste allant dans ce sens. Habituellement, elle allait coucher sa petite-fille, l'aidait à exécuter sa routine et allait ensuite la border en lui souhaitant bonne nuit. Mais aujourd'hui, cela semblait être trop d'efforts pour elle.
Kelly, inquiète, fixa avec insistance sa tutrice pour tenter d'intercepter son regard, pour lui faire dire ce qui n'allait pas ou, au moins, se faire dire que tout allait bien. Mais, alors qu'elle sentait les yeux de son meilleur ami peser sur elle, elle dut se rendre à l'évidence. Sa grand-mère était trop choquée par la situation pour leur prêter une quelconque forme d'attention. Pour ce soir, du moins. Alors elle se retourna vers Alex et vit dans ses yeux le reflet de son inquiétude. Il voyait lui aussi que quelque chose n'allait pas.
Cependant, tout ce qu'elle put faire pour le rassurer fut d'hausser les épaules et se lever pour accéder à la demande de leur tutrice.
Alex la contempla longuement avant d'en faire de même. Il ne paraissait pas du tout certain que cela était la méthode à suivre. Dans le regard qu'ils échangèrent, Kelly put lire qu'il voulait faire quelque chose de plus. Mais elle connaissait Mireille. Elle ne se laisserait pas consoler par eux alors que c'était son rôle à elle de faire ça pour eux. Et de toute façon, que pouvait-elle dire pour consoler son aînée alors qu'elle ignorait elle-même les paroles qui seraient en mesure de guérir son cœur meurtri ?
Alex finit par la suivre et ils s'éloignèrent tous les deux vers la chambre de Kelly où Alex dormait pour le moment, laissant seule la coquille vide qu'était devenue momentanément Mireille.
Leur routine avant de se coucher se déroula dans le silence complet. Kelly, à quelque part, comprenait le sentiment qui habitait sa grand-mère. Elle-même en était présentement habitée. Ce devait nécessairement être le cas puisqu'elle n'arrivait pas à pleurer ou même à ressentir une quelconque forme de tristesse alors qu'elle savait très bien que si son grand-père n'était pas déjà mort, il le serait dans les prochaines minutes. Elle était vide.
La fillette voyait très bien que des mots démangeaient la langue de son ami. Elle le voyait par sa façon d'ouvrir et fermer incessamment la bouche. De plus, il papillonnait autour d'elle et ses yeux n'étaient inquiets que comme les siens pouvaient l'être à son égard. Mais elle ne trouvait pas la force de s'en agacer ou même de le décharger de sa charge mentale en l'encourageant à se confier. De toute manière, ses mots n'auraient probablement aucun impact sur elle. Parce qu'elle était vide. Vide de sentiments. Tout comme cela avait été le cas à tellement de moments dans les dernières heures. Son cerveau n'acceptait pas de comprendre ce qui était en train de se passer et, dans les rares moments où un éclair de lucidité parvenait à la faire renouer avec la réalité, elle savait pertinemment que cet état de coquille vide reviendrait la chercher d'un moment à l'autre. Quand elle en aurait assez de souffrir et que son être réclamerait une pause.
— Kelly...
Voilà, son ami avait flanché. Le problème, c'était qu'elle ne voulait pas lui parler. Parce qu'elle le savait. Il la ferait renouer avec la cruelle réalité qu'elle ne voulait pas rencontrer. Du moins pas pour le moment. Elle avait besoin d'un moment seule avec elle-même. Mais elle savait que si elle se contentait d'ignorer Alex, celui-ci reviendrait à la charge. Alors elle prit son courage et sa détermination, regarda malgré elle froidement son frère d'adoption dans les yeux et trancha :
— Pas ce soir, Alex. Je n'ai pas envie de parler.
Puis, elle se mura dans le silence, reprit sa place dans le vide qui lui accordait un confort que rien dans la vraie vie ne pouvait lui offrir.
— Mais Kelly, tu ne vas pas bien, insista le garçon en s'avançant d'un pas vers elle. Et ça me fait peur...
De glace, la fillette se retourna une dernière fois vers lui pour interposer sa main entre eux.
— Pas ce soir, j'ai dit.
Sa voix n'était ni agressive ni douce. Seulement déterminée à avoir son moment de calme, de silence, de solitude. Choses qu'Alex ne pouvait pas lui offrir. Elle savait bien qu'elle le blessait. Mais, pour ce soir, pour une unique soirée, elle voulait s'occuper d'elle-même.
À pas réguliers, elle se rendit dans son lit en enjambant le petit matelas posé près de celui-ci où Alex dormirait. Elle voulait bien faire comprendre à son ami que ce n'était pas le moment. Sa petite chemisette de nuit qu'elle mettait pour l'une des premières fois, l'autre ayant été déchirée par Cynthia lorsqu'elle l'avait attaquée, sentait légèrement le renfermé et voletait autour d'elle gracieusement.
Derrière elle, Kelly entendit bien que son ami avait interrompu sa marche à sa suite. Ce qui signifiait sans doute qu'elle l'avait blessé. Et, bien égoïstement, cette pensée la satisfaisait. Elle allait enfin pouvoir avoir le calme qu'elle désirait tant.
Doucement, elle s'assit sur son matelas avant de retirer ses pantoufles et de rabattre ses jambes sur son lit en posant sa tête sur l'oreiller. Elle se serait attendue à ce que des larmes lui piquent les yeux. Qu'elle se mette à penser à son grand-père. Mais rien de tout cela n'arriva. Comme si elle était morte de l'intérieur et que ses sentiments s'étaient dissipés. Au départ, pas une seule pensée ne vint occuper son esprit et elle fit semblant de dormir, même si elle savait très bien que son meilleur ami était au courant qu'elle était incapable de cela, attendant malgré tout qu'il l’imite.
Cela prit de nombreuses minutes avant qu'Alex ne finisse par se coucher. Et une fois cela fait, il se mit à sangloter en silence. Cependant, malgré tout ça, Kelly était incapable d'être, comme à son habitude, compatissante. Elle ne ressentait rien, et rester aussi froide devant la souffrance de son meilleur ami le lui confirma plus que tout.
Bientôt, des pensées revinrent habiter son esprit, coupant tout contact avec le monde réel et les pleurs d'Alex. Mais dans toutes celles qui venaient tourner dans sa tête, pas une seule ne portait sur son tuteur, comme si tout en elles évitaient scrupuleusement cette information. Comme si tout son inconscient savait qu'une seule pensée en direction de cet être cher en amènerait d'autres et que tout cela la ferait souffrir. Alors la futilité des choses quotidiennes l'occupèrent un bon moment.
Au bout d'un moment, le rêve et la réalité s'emmêlèrent. Son esprit se brouilla, tout se mit à être confus et, sous ses paupières closes, elle sentit un vide se former. Un vide qui l'accueillait à bras ouverts pour la première fois depuis bien longtemps.
Épuisée, elle s'endormit.
Bonjour de la Gaspésie tout le monde !!! Eh oui, je vous poste cette partie en regardant la mer, deux capuchons remontés sur ma tête pour me protéger du vent ! Et j'ai une grande nouvelle : hier, pendant ma séance d'écriture, j'ai passé les 100 000 mots sur Nouvelle Lune !!! 😍😱 Je n'en revenais pas, sur le coup, j'étais en train d'écrire le partie 72 (une partie assez riche en révélations en plus) et j'ai passé ce cap !! Je n'arrivais pas à le croire, sincèrement. Alors retenez que lorsque vous aurez atteint la partie 72 de Nouvelle Lune, vous aurez lu l'équivalent d'un roman d'environ 400 pages dans un roman !! Vous irez prendre un gros livre chez vous et vous l'ouvrirez à la page 400, vous allez voir que c'est une bonne brique !! Alors voilà j'étais trop contente, parce que 100k mots était mon objectif pour Nouvelle Lune, c'était un palier que je voulais atteindre, alors le passer comme ça, en vacances... Wow, tout simplement !! Enfin, j'espère que vous avez aimé cette partie de Nouvelle Lune, n'hésitez pas à me le faire savoir ! Je dois vous avouer que je n'y ai pas trop retouché dans ma relecture (je suis en vacances, quand même !). Bref, je vous souhaite une très belle semaine (moi je repars de la Gaspésie demain 😥) et on se revoit la semaine prochaine !!
Et n'oubliez pas, restez positifs !
Bravo pour tes 100 000 mots 🎉 et bon retour de Gaspésie. 🥰
RépondreSupprimerMerci beaucoup !!!
SupprimerJe suis jalouse ! Présentement je viens juste de finir de travailler et je n'arrive pas à écrire et toi tu es en Gaspésie et tu dépasses le 100 000 mot... 100% jalouse, quoi ! En tout cas, bravo !
RépondreSupprimerMerci beaucoup Laura !! Et ce n'est pas grave si tu n'écris pas un jour, tu en as tellement d'autres pour te reprendre !!
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